Le corps du tuyau étant achevé, je pose le biseau. C'est une planchette èpaisse de 4 à 5 mm pour les petits tuyaux et de 10 mm pour les plus gros. Elle occupe toute la section intérieure et est collée sur 3 côtés (***).

L'angle du biseau est voisin de 45°. La fibre du bois est choisie parallèle à l'arrête du biseau. Le biseau dépasse de quelques millimètres à l'extérieur. Il sera arasé et affiné après séchage de la colle. Je mène cette opération délicate et très importante avec une lime très fine : c'est cela qui va conditionner la qualité sonore du tuyau.


Le trait bleu montre l'orientation à donner à la lime pour achever le biseau. Le dessin, à droite, donne le profil du biseau, il fait apparaître un très léger chanfrein pour « casser » l'arrête.
La lèvre inférieure du tuyau est une planchette un peu plus épaisse que celles qui font le corps du tuyau. Je la frotte sur une feuille de papier abrasif fin pour que l'arrête proche du biseau soit nette et bien droite. Elle est vissée ou collée. Dans ce dernier cas, je ne la colle pas avec la colle à bois blanche comme tout ce qui a été collé précédemment mais avec une « colle de luthier », c'est à dire une colle à base d'os ou de poisson, que l'on prépare à chaud, au bain-marie. Une telle colle permet le démontage ultérieur de la pièce, avec une lame fine chaude, sans destruction. C'est un point très important pour pouvoir affiner l'harmonisation après l'achèvement complet de l'orgue.
Le pied du tuyau est composé d'une pièce en bois qui s'ajuste rigoureusement à l'intérieur du bas du tuyau et dans laquelle un trou circulaire permet d'insérer un tube (réalisé au tour à bois). C'est lui qui conduit le vent jusqu'à la bouche.Tous les pieds des tuyaux, ouverts ou fermés, sont faits de la même façon : un tube en bois collé à une planchette qui vient juste s'adapter au bas du corps du tuyau. Je fais le tube à partir de tourillon de hêtre que l'on trouve en vente dans tous les magasins de bois. Je tronçonne des morceaux et je les perce dans l'axe sur toute leur longueur. Avec un modeste tour à bois, je façonne les deux extrémités : je donne une forme légèrement cônique à un bout et je fais un épaulement à l'autre. C'est lui que je colle ensuite à la planchette.
Pour les tuyaux bouchés (bourdons) il ne reste plus qu'à faire le bouchon.
Le bouchon du bourdon est, fait d'une pièce en bois rectangulaire, épaisse d'environ 15mm, au centre de laquelle je colle une poignée. La pièce est taillée avec des dimensions légèrement inférieures à celles de l'intérieur du tuyau pour pouvoir mettre un joint d'étanchéité constitué d'un morceau de feutrine et d'un film plastique souple.

Un bourdon avec un pied court de 4 cm. Deux doublettes avec des pieds de 10 cm.


Quatre bourdons en bois. La planchette qui constitue la lèvre inférieure du second tuyau de gauche est enlevée, ce qui permet de distinguer le biseau.
Pour les tuyaux « ouverts » il n'y a évidemment pas besoin de construire de bouchon ! Il faut toutefois fixer une petite plaque de plomb à l'extrémité de chaque tuyau pour pouvoir l'accorder. Il est, en effet, impossible de couper un tuyau en bois à une longueur correspondant à un accord rigoureux. Si, même, cela était possible, les variations saisonnières de température modifient la hauteur du son ; on doit donc pouvoir réaccorder finement chaque tuyau. La petite feuille de plomb ferme très légèrement le tuyau : plus on le ferme, plus la fréquence baisse, à l'inverse, pour monter la fréquence, il suffit d'ouvrir légèrementla languette. Le plomb ne présentant pas d'élasticité, cela permet un accord très précis.

Languettes de plomb pour l'accord des tuyaux ouverts en bois.
Remarque

Il est usuel de réaliser la lèvre supérieure selon la photo ci-dessus, en creusant la planche avec un ciseau à bois pour façonner la lèvre supérieure et en laissant deux rebords de part et d'autre de la bouche. Il me semble qu'il est beaucoup plus facile et rapide de faire comme le montre la photo ci-dessous , c'est à dire sans laisser de rebord. Si la méthode habituelle peut créer un « effet d'oreilles » de part et d'autre de la bouche, ma méthode simple ne semble pas apporter de dégradation dans la qualité des sons émis (il est facile de disposer deux petites pièces de bois de part et d'autre de la bouche pour en faire l'expérience !).
